Émoticônes

Les compositeurs et théoriciens du Baroque ne s’accordent pas sur le nombre et la nature des « passions » qui sont pourtant au cœur de leur conception de la musique qui, selon eux, doit les évoquer, les souligner, et même les amplifier. Voulant vous conduire sur ce chemin des « passions de l’âme », nous étions très embêtés de ne pas trouver de fil conducteur qui puisse donner la trame d’un concert, et c’est finalement chez Descartes que nous avons trouvé une solution.

« On peut facilement remarquer qu’il n’y en a que six qui soient telles [simples et primitives] ; à savoir l’admiration, l’amour, la haine, le désir, la joie et la tristesse ; et que toutes les autres sont composées de quelques-unes de ces six, ou bien en sont des espèces. Descartes, Les Passions de l’âme.

Alors nous avons cherché quelles musiques pouvaient illustrer quelles passions, et, surprise…nous n’avons rien trouvé pour la Haine. La Violence…oui…la Destruction…mais rien dans notre répertoire qui nous semble dire la Haine que nous avons remplacée par la Noirceur.

Si nous avons intitulé le concert « émoticônes », c’est qu’il nous semble que nous vivons nos « passions » d’une manière plus légère aujourd’hui. Alors que pour Descartes elles correspondent à nos « esprits animaux » et s’imposent à nous avec domination, nous recherchons aujourd’hui ces « mouvements de l’âme » et y voyons le sel de l’existence. Un élément positif, qui nous aide à vivre. Nos « passions » ne sont plus tout à fait celles des compositeurs baroques, ni celles du philosophe-mathématicien. La multiplicité des émoticônes et l’usage presque immodéré que nous en faisons disent au final assez bien comment nous revendiquons nos sentiments et les exprimons au quotidien.